La fondation au secours des enfants souffrant de la malnutrition aiguë sévère

Dans une double interview, Eric, le nutritionniste de la Fondation Hubi & Vinciane et l’assistante sociale de l’hôpital expliquent comment ils travaillent ensemble dans la lutte contre la malnutrition.

Quelles sont les causes de la malnutrition aiguë sévère ?

Eric : La survenue et l’émergence de la malnutrition aiguë sévère s’expliquent par des problématiques d’ordre social, religieux, économique, culturel et cultuel. En effet, la population béninoise, dans sa majorité, dispose d’ un faible pouvoir d’achat et vit dans des milieux enclavés dont les voies d’accès sont en très mauvais état. Tous ces éléments limitent l’accessibilité aux aliments et aux soins de qualité. La taille élevée des ménages due à la polygamie, aux naissances multiples et à la faible utilisation des méthodes de planification familiale, influe sur l’état nutritionnel des enfants. Par ailleurs, plusieurs interdits et tabous alimentaires sont observés au Bénin. Au nord du Bénin, la population peine à pratiquer l’allaitement maternel exclusif. Certaines ethnies considèrent le colostrum comme impropre à la consommation. D’autres quant à elles refusent de donner de la viande ou du poisson ou de l’œuf aux enfants au risque de les prédisposer au vol. Dans d’autres ethnies encore, les pères sont priorisés dans le partage des repas surtout en ce qui concerne les morceaux de viande.

Comment se fait la prise en charge de la malnutrition aiguë sévère ?

L’assistante sociale de l’hôpital: La prise en charge de la malnutrition aiguë se fait à divers niveaux de la pyramide sanitaire en fonction de la forme (modérée, sévère sans complication ou sévère avec complication) et suivant un protocole élaboré. La malnutrition aiguë sévère avec complication est prise en charge dans les centres de nutrition thérapeutique qui sont pour la plupart logés dans le service de pédiatrie des hôpitaux de zone et de département pour une durée moyenne de 14 jours d’hospitalisation.

Comment se fait la symbiose des actions de la prise en charge au niveau des différents acteurs intervenant ?

Eric : Dans les communes d’intervention de la Fondation Hubi & Vinciane, une équipe dynamique composée d’un pédiatre, d’infirmiers, d’aides-soignants, d’assistantes sociales et de nutritionnistes travaillent de concert sur les différents volets de traitement pour assurer la prise en charge.
Le traitement médicamenteux est assuré par le pédiatre, les infirmiers et les aides-soignants. Il vise à traiter toutes les maladies associées à la malnutrition. Le traitement nutritionnel et le traitement psychosocial sont assurés par l’assistante sous la surveillance du pédiatre. En effet, un(e) assistant(e) est un paramédical qui prend en charge les cas sociaux.

Quel est le rôle d’une assistante sociale dans la prise en charge d’un enfant malnutri ?

une alimentation saine et équilibrée

L’assistante sociale : Dans le cadre de la prise en charge de la malnutrition aiguë sévère avec complication, j’ accueille les mères d’enfants malnutris ou les garde-malades afin de les installer. J’enregistre les enfants et prends les paramètres anthropométriques et cliniques pour établir un dossier à chaque patient. Je sensibilise les mères ou les garde-malades sur les conduites à tenir lors du traitement. Je prépare les laits thérapeutiques (F75 ou F100), élabore la ration alimentaire quotidienne de chaque enfant, la répartition en prise de repas et le suivi de l’administration des repas aux enfants.

Quel est le rôle du nutritionniste dans la prise en charge d’un enfant malnutri ?

Eric : Je sers d’agent de liaison entre l’hôpital et la communauté. Je dépiste les cas en communauté que je réfère à l’hôpital vers le service pédiatrie. Je suis le lien direct avec l’assistante sociale pour un bon suivi des enfants malnutris sortis de l’hôpital. J’ organise des visites à domicile chez les parents d’enfants malnutris. Au cours de ces visites, je sensibilise les parents sur une alimentation saine et équilibrée et beaucoup d’autres thématiques permettant de prévenir une probable rechute. J’assure aussi des démonstrations culinaires pour montrer des recettes équilibrées adaptées pour assurer le bon état nutritionnel des enfants guéris de la malnutrition.

Que fait la mère ou le garde-malade de l’enfant ?

La fondation au secours des enfants souffrant de la malnutrition

L’assistante sociale : La maman ou le garde de l’enfant reçoit pendant cette période de 14 jours une formation sur l’alimentation équilibrée, la préparation des diverses bouillies enrichies. Elle est également sensibilisée sur l’hygiène alimentaire et corporelle. Cette formation lui permet de mieux garder l’enfant à la maison après le traitement de l’hôpital. Notons qu’il n’est pas toujours facile de référer un enfant malnutri détecté en communauté par le nutritionniste.

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

Les zones les plus touchées sont souvent inaccessibles. Les mères d’enfants ont de la peine à quitter le foyer pour venir faire les 14 jours de traitement au risque de perdre leur mari ou les enfants restants. Nous avons également un niveau de vie très faible qui ne permet pas à la maman de tenir facilement les 14 jours car l’enfant est pris en charge mais pas la maman. Nous constatons également le faible taux d’implication des maris. Cependant nous disons merci à la Fondation Hubi & Vinciane qui se bat à chaque instant pour sauver ces enfants que nous référons.